Chaque année, la ville de Montréal s’anime au rythme d’une multitude d’événements culturels festifs. Les foules se rassemblent pour profiter de la musique, de l’humour, du théâtre et du cirque. De plus en plus, les événements gastronomiques gagnent également en popularité dans la ville. C’est notamment le cas du rendez-vous estival des foodtrucks sur l’Esplanade du Parc olympique, qui a lieu chaque premier vendredi du mois, de juin à octobre.
«La métropole a développé dans les dernières années des stratégies de mise en valeur de son attractivité touristique orientées à la fois vers la construction d’un urbanisme événementiel et la promotion d’une culture gastronomique singulière, comme en témoigne la création récente de l’Office montréalais de la gastronomie par Tourisme Montréal», observe Van Troi Tran lors d’une entrevue avec Actualité UQAM. Le professeur Van Troi Tran, récemment recruté par le Département d’études urbaines et touristiques de l’ESG UQAM, a obtenu une subvention du FRQSC d’un peu plus de 44 000 dollars. Cette subvention permettra de financer son étude intitulée « Ethnographies de l’événementiel : la pluralité des festivals culinaires et gastronomiques à Montréal ».
En tant qu’enseignant au Certificat en gestion et pratiques socioculturelles de la gastronomie, au Programme court de deuxième cycle en études sur l’alimentation et au DESS en études sur l’alimentation, Van Troi Tran se consacre à la recherche dans le domaine de l’événementiel gastronomique, explorant ainsi les multiples facettes de ces festivals dans la métropole montréalaise. « Ces événements culinaires peuvent prendre une coloration ethnoculturelle (Polski Piknik, Orientalys), communautaire (les fêtes de quartier), commerciale (le Mondial de la bière, Soif de Cidre), gastronomique (le festival MTL à TABLE) ou historique (le Marché public dans l’ambiance du 18e siècle), sans oublier de nombreuses autres manifestations culturelles qui comportent une dimension culinaire, comme le Festival Afromonde ou A Taste of the Caribbean », illustre-t-il.
Exploration des pratiques variées à travers une mosaïque de perspectives
Van Troi Tran entreprend une recherche visant à explorer, à travers une approche ethnographique, la variété des pratiques mises en avant lors des événements alimentaires et gastronomiques à Montréal. Son projet vise à dresser un panorama exhaustif de cette diversité de pratiques.
« Nous souhaitons mieux comprendre comment les participants et exposants négocient leurs pratiques de mise en valeur dans les contraintes spatiales, temporelles, administratives et logistiques imposées par ces événements », précise-t-il. Les étudiantes et étudiants engagés dans ce projet entreprendront une démarche méthodique. Dans un premier temps, ils élaboreront une typologie des différents événements culinaires et gastronomiques à Montréal. Ensuite, ils conduiront des entretiens semi-dirigés avec les participants et les organisateurs, afin d’explorer les discours, les pratiques, les ambiances et les représentations qui enrichissent l’expérience alimentaire et gastronomique. Parallèlement, ils observeront sur le terrain et captureront des éléments de documentation audiovisuelle pour approfondir leur compréhension. Cette approche multidimensionnelle permettra de mieux appréhender la complexité et la diversité des événements étudiés.
La cuisine à travers les expositions universelles : une vitrine de l’alimentation mondiale
« Au départ, je m’intéressais à la façon dont les gens ont vécu les expositions universelles de Paris, plus précisément celles de 1889 et de 1900. C’est en discutant avec mon directeur de thèse, à l’Université Laval, que l’alimentation s’est avérée un bon filon, raconte-t-il. Le sujet avait été peu étudié, car les spécialistes des expositions universelles s’intéressent avant tout à la manière dont les pays se représentent ainsi qu’à l’architecture des monuments et des bâtiments, très peu à la vie quotidienne et à ce que les visiteurs et visiteuses font sur le site. »
La thèse de Van Troi Tran met en lumière les multiples tensions, interactions et négociations qui émergent dans le domaine de l’alimentation. En résultat, il a publié un ouvrage intitulé « Manger et boire aux expositions universelles. Paris 1889-1900 » (Presses universitaires de Rennes, 2012). Par la suite, Van Troi Tran a effectué un postdoctorat à Harvard, marquant ainsi une transition vers la modernité dans ses recherches. « J’ai assisté à l’expo universelle de Shanghai en 2010 pour observer comment les participants étrangers interagissaient avec les autorités chinoises et l’appareil bureaucratique, en lien notamment avec l’inspection des aliments et les contraintes entourant la restauration », précise-t-il.
En tant que chargé de cours en ethnologie à l’Université Laval, Van Troi Tran a également contribué pendant une décennie en tant qu’assistant à la rédaction d’Ethnologies, la revue de l’Association canadienne d’ethnologie et de folklore. Son engagement prolongé dans ce rôle démontre son implication et son expertise dans le domaine de l’ethnologie et son désir de promouvoir la recherche et les études ethnographiques au sein de la communauté académique.